Francis Gurry ouvre les portes d’une nouvelle ère d’espoir et de multilatéralisme à l’OMPI 13/10/2008 by Catherine Saez, Intellectual Property Watch Leave a Comment Share this:Click to share on Twitter (Opens in new window)Click to share on LinkedIn (Opens in new window)Click to share on Facebook (Opens in new window)Click to email this to a friend (Opens in new window)Click to print (Opens in new window)Par William New Fonctionnaire de longue date à l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI), Francis Gurry a ce mois-ci pris les rênes de l’organisation. Les différents partenaires espèrent que son élection marquera un retour au calme au sein de l’institution des Nations Unies et que celle-ci retrouvera une place pertinente au niveau mondial. Cependant, les défis à relever sont nombreux. Les gouvernements et les partenaires de tous bords se sont montrés impatients que l’OMPI « se relève » après les batailles de ces dernières années sur les questions de gouvernance et de développement, et ont manifesté leur espoir que l’organisation retrouve sa place au centre de l’activité politique mondiale en matière de propriété intellectuelle. L’Australien Francis Gurry, qui travaille à l’OMPI depuis plus de vingt ans et a notamment occupé les fonctions de conseiller juridique et de vice-directeur général, a été nommé directeur général lors de l’Assemblée générale annuelle des membres qui s’est tenue du 22 au 29 septembre 2008. Il a pris ses fonctions le 1er octobre pour une durée de six ans et prévoit de rapidement mettre en œuvre son projet de restructuration de l’organisation. M. Gurry se voit confier la dure tâche d’aider les membres à dépasser leurs divergences, qui concernent parfois le cœur même du système mondial de propriété intellectuelle. Reste également à voir la manière dont il conduira l’organisation à surmonter ses différends internes passés. Pour regagner la confiance de ses partenaires et de son personnel, l’OMPI devra les convaincre qu’elle a éliminé toute possibilité de corruption ou de mauvaise gestion financière, qu’elle a créé un environnement de travail favorable pour les employés, qu’elle a su s’adapter aux changements planétaires et qu’elle a établi comme pratique courante la prise en compte des points de vue de tous les États-membres, aussi petits qu’ils soient. Apparemment, M. Gurry semble même bénéficier du soutien des gouvernements de pays membres auparavant sceptiques. Néanmoins, il se verra probablement rappeler sa victoire avec une seule voix d’avance lors de sa nomination au poste de directeur général. C’est au cours de la semaine du 20 octobre que M. Gurry devrait présenter son nouveau programme, avant une concertation avec les membres. Cette année, les réunions se sont terminées rapidement et sur une note positive, contrairement à l’année dernière où aucun accord n’avait été trouvé. Cependant, les questions liées au budget ont été repoussées et seront abordées lors de l’Assemblée générale du 12 décembre 2008, qui sera précédée d’une session du Comité du programme et budget les 10 et 11 décembre. Le président de l’Assemblée, le Nigérian Martin Uhomoibhi, a conclu en déclarant qu’il considérait l’OMPI prête à « assumer son rôle de tribune principale » pour les débats internationaux sur la propriété intellectuelle. Le changement le plus important qui se soit opéré depuis l’année dernière est le départ du directeur général Kamil Idris, qui a quitté ses fonctions avec une année d’avance après avoir perdu la confiance des différents acteurs de l’OMPI. En effet, outre certaines rumeurs infondées sur sa mauvaise gestion des finances et des ressources humaines de l’organisation, il a été découvert que ce dernier avait menti sur son âge pendant près de vingt ans. Mais aucune de ces questions n’a été soulevée lors des réunions de cette année. Les membres se sont levés les uns après les autres pour faire des adieux chaleureux à M. Idris et lui décerner une récompense pour ses années passées au service de l’organisation. Ce dernier s’est également vu verser sans condition l’équivalent d’un salaire de directeur général et des avantages sociaux qui s’y rapportent pour les 14 mois à venir. Le Comité d’audit de l’OMPI, créé en 2005, devait se réunir du 6 au 9 octobre pour traiter de plusieurs questions administratives sensibles. Au sommaire de cette réunion figuraient probablement les activités de la Division de l’audit et de la supervision internes, le suivi de l’évaluation bureau par bureau de l’OMPI (qui consistait à examiner les postes de chaque membre du personnel de l’organisation et à trouver des possibilités d’amélioration), la construction d’un nouveau bâtiment administratif, les achats, les recommandations globales et d’autres questions liées au personnel. Au cours des assemblées, un groupe de travail fermé constitué d’États membres a rédigé un contrat à l’intention de M. Gurry spécifiant que ce dernier allait toucher « un salaire annuel net équivalant au revenu le plus élevé pouvant être perçu par le directeur d’une institution spécialisée des Nations Unies dont le siège est basé à Genève ». Le montant de ce salaire a été estimé à 23 421 CHF nets par mois, ce qui équivaut à un salaire net annuel de 280 944 CHF, soit 258 107 USD. Par ailleurs, M. Gurry percevra une « indemnité annuelle de représentation » de 62 100 CHF, une « indemnité annuelle de logement » de 76 200 CHF, une retraite ainsi que d’autres avantages sociaux. Ce contrat est similaire à celui qu’avait signé son prédécesseur, Kamil Idris. Questions politiques Lors des assemblées, les rapports des comités de l’OMPI chargés des questions politiques ont également été approuvés. D’une manière générale, concernant ce type de questions, les pays développés espèrent relancer les débats sur l’harmonisation des systèmes nationaux de brevets, améliorer l’efficacité, les compétences et l’influence de l’OMPI, et continuer à maîtriser les dépenses (ces pays sont ceux qui règlent la majeure partie des factures de l’OMPI à travers les droits payés par leurs utilisateurs). Ils sont également favorables à ce que l’OMPI s’engage davantage sur les questions de mise en application, point sur lequel les pays en développement sont à présent d’accord. D’autre part, après l’échec des négociations pour un traité sur les droits des organismes de diffusion, il serait certainement intéressant de relancer l’étude de la question de la protection des œuvres soumises à des droits d’auteur diffusées sur le Web. De leur côté, les pays en développement ont particulièrement à cœur de garantir la mise en application ferme des 45 recommandations adoptées l’année dernière, qui visent à rendre l’OMPI et le système mondial de propriété intellectuelle plus efficaces et plus sensibles à leurs besoins, et de laisser ouvertes les propositions qui n’ont pas encore été adoptées. Ils souhaiteraient également que la possibilité d’un traité sur les limitations et exceptions au droit d’auteur soit étudiée et que les longues discussions relatives à la protection des savoirs traditionnels et du folklore avancent enfin. Parmi les décisions clés qui interviendront au cours des prochains mois figure la définition des prérogatives du nouveau Comité du développement et de la propriété intellectuelle (CDPI), créé lors des assemblées de 2007, qui a vocation à superviser l’exécution du Plan d’action pour le développement. Les pays développés sont peu favorables à l’idée d’accorder à ce comité des compétences qui empiètent sur celles d’autres comités de l’OMPI, comme ceux chargés des questions liées aux brevets et au droit d’auteur. Mais les partisans de ce comité considèrent le développement comme une question intersectorielle. Les membres ont convenu d’une conférence du Comité permanent du droit des brevets lors de laquelle seront abordées les questions des brevets, ainsi que de la politique sociale et publique. Selon un porte-parole brésilien, cet ordre du jour accentue l’idée que le développement est un sujet transversal au sein de l’OMPI. Cependant, les pays développés se sont opposés à ce que le CDPI empiète sur les platebandes des autres comités. L’assemblée a donné son accord pour l’organisation d’une conférence des donateurs en vue de mobiliser, à travers des fonds de contributions volontaires ou d’affectation spéciale, les ressources nécessaires à l’OMPI pour apporter son aide aux pays les moins avancés, en particulier en Afrique, sur les questions de propriété intellectuelle. Un porte-parole du Groupe africain, très attentif à la progression du Plan d’action pour le développement, à déclaré suite aux assemblées : « Les gens commencent à croire les uns en les autres. Un climat de confiance règne. J’espère que tout cela va se concrétiser ». La vision de Francis Gurry Dans le discours qu’il a prononcé devant les assemblées puis devant la presse, M. Gurry a signalé qu’il était urgent de rattraper le retard accumulé sur la question du système de brevets. Il a ajouté qu’il était temps de se pencher sur les problèmes des conséquences d’Internet sur le droit d’auteur, de la contrefaçon et du piratage, de l’usage de la propriété intellectuelle pour réduire la « fracture du savoir » au niveau mondial et renforcer les capacités dans les pays les moins avancés, et du manque de protection des savoirs traditionnels et des expressions culturelles traditionnelles (folklore). Selon M. Gurry, la propriété intellectuelle doit servir à réduire l’inégalité des savoirs et permettre de mieux tirer parti des avantages de l’innovation et de l’économie du savoir. L’OMPI peut créer « une infrastructure mondiale du savoir, constituée de bases de données publiques et libres d’accès contenant des informations d’ordre technologique ou scientifique et fonctionnant selon des normes communes pour permettre l’échange de données », a-t-il déclaré. Il a ajouté que l’OMPI pouvait également aider les pays à adopter des stratégies nationales en matière de propriété intellectuelle et d’innovation, et qu’il prévoyait d’augmenter les ressources humaines et financières de la Division des pays les moins avancés, créée par M. Idris. M. Gurry a par ailleurs fait part de son intention de créer une division de la recherche et des statistiques économiques. Une telle entité permettrait aux États membres d’avoir accès à des études d’impact afin d’analyser les orientations stratégiques nationales et les nouveaux développements susceptibles d’avoir une incidence sur le monde de la propriété intellectuelle et sur l’OMPI. En outre, le nouveau directeur général a appelé de ses vœux des résultats concrets concernant la protection des savoirs traditionnels et du folklore. Il n’a pas fait référence aux ressources génétiques. Pour finir, M. Gurry a également proposé la création d’une nouvelle division au sein du Secrétariat, chargée d’étudier la contribution que peuvent apporter le système de la propriété intellectuelle et l’OMPI dans le cadre de l’action collective de lutte contre ces problèmes mondiaux. Comme il l’a précisé, l’organisation doit démontrer son utilité à travers sa participation aux débats mondiaux sur le changement climatique, la désertification, les épidémies, l’accès aux soins, la sécurité alimentaire et la préservation de la biodiversité. Nouveau bâtiment administratif, présidents des comités Selon ce qu’a annoncé l’OMPI à ses membres cette semaine, les travaux de construction du nouveau bâtiment, d’un coût de 153 000 000 CHF et commencés en avril, devraient prendre fin en octobre 2010. Des questions financières internes ont été soulevées, ce qui explique la fermeture du site depuis plusieurs années et le trou béant en face de l’entrée principale de l’OMPI. Le nouveau bâtiment administratif sera adjacent au bâtiment existant du siège. Il comprendra un hall au niveau principal ainsi qu’une caféteria de 320 places, cinq étages de bureaux et un sous-sol sur quatre niveaux. Le 25 septembre, les nominations des présidents de différents organes liés à l’OMPI ont été approuvées. Alberto Dumont, l’ambassadeur d’Argentine à Genève, prendra la tête du Comité de coordination, avec pour premier vice-président Kyrgyztani Muktar Djumaliev et pour second vice-président le Tunisien Mohamed Abderraouf Bdioui. Le Comité de coordination est l’organe exécutif composé d’États membres le plus important de l’OMPI. Il est chargé de nommer les hauts fonctionnaires, comme les nouveaux adjoints du directeur général, qui entreront en fonction à la fin de l’année prochaine. Selon certaines sources, l’identité du prochain président du Comité du programme et budget reste incertaine, le groupe B ayant désigné la France et un autre groupe ayant désigné la Roumanie. Les nominés pour ces groupes sont le Français Christophe Guilhou et Doru-Romulus Costea, l’ambassadeur roumain à Genève. Cette semaine, les représentants des cinq plus grands offices de brevets du monde (l’« IP5 ») se sont rencontrés pour organiser leur prochaine réunion qui se tiendra les 27 et 28 octobre prochains à Jeju, en Corée du Sud. Leur priorité est de trouver le moyen de partager le travail. [Pour en savoir plus sur l’IP5, lire l’article du 25 septembre 2008 sur www.ip-watch.org] Traduit de l’anglais par Griselda Jung Share this:Click to share on Twitter (Opens in new window)Click to share on LinkedIn (Opens in new window)Click to share on Facebook (Opens in new window)Click to email this to a friend (Opens in new window)Click to print (Opens in new window) Related "Francis Gurry ouvre les portes d’une nouvelle ère d’espoir et de multilatéralisme à l’OMPI" by Intellectual Property Watch is licensed under a Creative Commons Attribution-NonCommercial-ShareAlike 4.0 International License.