Standards ouverts et accès à la connaissance au menu des discussions du Forum sur la gouvernance de l’Internet 22/11/2007 by Catherine Saez, Intellectual Property Watch Leave a Comment Share this:Click to share on Twitter (Opens in new window)Click to share on LinkedIn (Opens in new window)Click to share on Facebook (Opens in new window)Click to email this to a friend (Opens in new window)Click to print (Opens in new window)Par Monika Ermert pour Intellectual Property Watch RIO DE JANEIRO – Les questions liées à la propriété intellectuelle ont été parmi les sujets que les gouvernements avaient évité d’aborder pendant le sommet sur la société de l’information en 2003-2005, qui a débouché sur la création du Forum sur la gouvernance de l’Internet (FGI). Elles n’en ont pas moins été discutées dans plusieurs ateliers organisés lors de la deuxième réunion du Forum, qui a eu lieu à Rio de Janeiro la semaine dernière. Les organisateurs de la Coalition dynamique sur les Standards Ouverts, de la Coalition dynamique sur l’Accès à la connaissance (A2K) et la nouvelle Coalition sur l’éducation numérique se sont déclarés satisfaits de l’intérêt suscité par les questions de propriété intellectuelle. David Gross, responsable de la délégation américaine, a déclaré qu’il était intéressant de voir à quel point les questions de propriété intellectuelle sont revenues dans les débats. « Les questions de propriété intellectuelle ont toujours été une question importante », a estimé David Gross, coordonnateur américain des politiques internationales en matière de communication et d’information. « Mais d’autres instances ont été créées pour traiter spécifiquement de cette question, notamment l’OMPI (Organisation mondiale de la propriété intellectuelle) ou l’OMC (Organisation mondiale du commerce). Que les gens pensent que le FGI est le lieu pour débattre de ces questions m’a surpris ». David Gross a toutefois qualifié la réunion d’occasion manquée, estimant qu’il aurait mieux valu s’intéresser davantage à la question du flux libre de l’information. Les membres de la nouvelle Coalition sur l’éducation numérique, qui rassemble des enseignants, des chercheurs, des éditeurs, des techniciens et des hommes politiques, prévoit de conduire une étude sur les effets de la protection des droits de propriété intellectuelle dans les écoles du monde entier. Ils envisagent également de travailler sur les chaînes de publication des documents numériques dans le domaine éducatif afin de créer un système d’édition scolaire, comme l’ont indiqué à Intellectual Property Watch des membres du projet Société de l’information de l’Ecole de droit de Yale. « Si l’avènement de l’ère numérique ouvre de grandes perspectives pour les éducateurs et les apprenants, les politiques et règles relatives à l’information n’ont pas suffisamment pris en compte le caractère unique des activités éducatives », écrivent les membres de la Coalition dans leur première déclaration. Nouvelle action antitrust contre Microsoft La Coalition dynamique sur les Standards Ouverts a invité Thomas Vinje, l’un des avocats de Clifford Chance à Rio de Janeiro afin qu’il donne un aperçu de la nouvelle procédure ouverte par l’Union européenne à l’encontre de Microsoft. Thomas Vinje représentait le Comité européen pour des systèmes interopérables (ECIS) lors de la première action antitrust lancée à l’encontre de Microsoft. Lors d’une conférence de presse, il a déclaré que le Bureau du Commissaire européen en charge de la concurrence travaillait de manière intensive sur la deuxième procédure maintenant, le tribunal de première instance de la Cour de justice des Communautés européennes ayant rendu sa décision dans le premier procès. La nouvelle procédure porte principalement sur trois aspects. Il est, en premier lieu, reproché à Microsoft d’avoir empêcher les fournisseurs d’autres logiciels de traitement de textes d’avoir accès à l’information qui leur auraient permis de rendre leurs produits compatibles avec les ordinateurs équipés du système d’exploitation de Microsoft. « Comme vous avez probablement pu le constater, les utilisateurs Microsoft peuvent parfois ouvrir des documents créés sous Open office, parfois pas. » Microsoft aurait également privilégié ses propres logiciels de messagerie et de collaboration, tels que Outlook, dans les interfaces de ses serveurs Microsoft Exchange. Le troisième aspect, selon Thomas Vinje , concerne plus directement l’Internet et le travail effectué par le FGI dans la mesure où il vise à remettre en cause la dépendance croissante des applications Web envers le . NET. framework, une plateforme Microsoft pour le développement de logiciels d’application Web. « Ce programme constitue une tentative de ‘propriétariser l’Internet, » a estimé Thomas Vinje. Il considère qu’il s’agit là du « même type de comportement » que celui qui a valu à Microsoft une première condamnation pour entrave à la concurrence sur les systèmes d’exploitation. Mais des différences existent entre les deux procédures sur deux points, a-t-il précisé. « Premièrement, la Commission dispose d’une plus grande expertise et de meilleures ressources qu’en 1993, date à laquelle la première procédure contre Microsoft a été lancée, » selon ce qu’il a indiqué. « Deuxièmement, il existe un précédent, une décision de justice qui est venue confirmée les principes applicables. » Thomas Vinje a proposé à d’autres autorités nationales, de se joindre à la procédure en cours ou de lancer leurs propres actions, comme l’ont fait les autorités sud-coréennes. « Les autorités de concurrence aiment la compagnie, » a t-il indiqué. S’il ne s’attend pas à voir les autorités américaine de concurrence se joindre à eux avant la fin de la procédure, il estime que la situation pourrait évoluer avec la nomination d’un nouveau gouvernement. La possibilité reste également ouverte aux gouvernements de s’adresser à la Commissaire en charge de la concurrence pour lui faire part de leurs préoccupations. Thomas Vinje a souligné que la décision attendue de l’ISO (Organisation internationale de normalisation) concernant le processus d’adoption du format OOXML développé par Microsoft, qui est actuellement en discussion, pourrait avoir une légère incidence sur la procédure. Un premier vote a eu lieu, selon Georg Greve, Président de la Free Software Foundation (FFS), dans lequel il a manqué seulement six voix à Microsoft pour la norme soit adoptée. « En ce moment, Microsoft tente de convertir autant de votes négatifs possibles en votes positifs et nous faisons le contraire, en essayant de convertir autant de votes positifs possibles en votes négatifs, » a déclaré Georg Greve à Rio. Dans le cadre de la procédure de normalisation ce sont principalement les représentants des gouvernements nationaux qui sont appelés à voter, mais nombre de gouvernements sont représentés par des associations industrielles ou des organisations privées. Le cas de Microsoft a mis à jour la faiblesse du processus de normalisation, selon Georg Greve. « Le processus traite normalement de questions techniques et il n’existe aucune procédure pour résoudre ce genre de conflit, » a t-il expliqué, ajoutant que la procédure était éminemment politique. Les normes comme mécanismes parallèles de gouvernance Sensibiliser aux conséquences résultant de l’adoption de normes et de processus de normalisation est exactement le but poursuivi par la Coalition dynamique sur les standards ouverts, a déclaré Susan Struble de la Société Sun Microsystems, un membre de la coalition. « Les normes sont invisibles, elles constituent des mécanismes politiques parallèles, des moyens parallèles de gouvernance, » a estimé Susan Struble lors de la réunion de Rio. Il est nécessaire de s’informer sur le déroulement de la procédure de normalisation et de comprendre que des centaines de consortium industriels étaient impliqués et non pas seulement quelques grands organismes de normalisation. La Coalition s’est fixé pour objectif d’informer les gouvernements sur la réalité du problème et des effets qu’il peut résulter sur le développement de l’adoption de mesures de protection de la propriété intellectuelle et de normes. Elle s’est réjouie que la question des normes soit évoquée par Sergio Rezende, ministre brésilien des sciences et de la technologie et Anriette Esterhuysen, Présidente de l’association pour la communication progressive. Selon Anriette Esterhuysen, « De plus en plus de normes sont adoptées en dehors des espaces publics qui ont des implications sociales et limitent les droits des utilisateurs sur Internet et il est impératif que le FGI s’interroge sur des solutions. Cela touche aux questions de propriété intellectuelle et d’interopérabilité entre les outils et applications, autant d’éléments qui ont un impact sur les coûts. » Propriété intellectuelle et développement L’introduction par l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle d’un programme de développement a été applaudi à Rio à la fois par la Coalition dynamique sur les standards ouverts et la Coalition dynamique sur l’accès à la connaissance (A2K). Les deux groupes espèrent la mise en œuvre prochaine des différentes mesures définies dans le cadre du programme. « Les standards ouverts sont parmi les thèmes en discussion, » a déclaré Thiru Balasubramaniam de Knowledge Ecology International (KEI), en se référant au Comité permanent du droit des brevets de l’OMPI. Il a ajouté que la question des normes pourrait également figure dans le programme de développement. Les activistes sont également satisfaits du rapport que doit rendre le Comité l’année prochaine concernant le coût des procédures d’enregistrement. Robin Gross, directrice exécutive de IP Justice, a également évoqué la mise en oeuvre du programme de développement. « Maintenant nous pouvons aborder les questions essentielles » a t-elle déclaré. La proposition de traité sur l’accès à la connaissance mentionnée dans le nouveau programme peut prendre un certain temps, selon elle, mais l’intérêt autour de cette question augmente. La Coalition A2K a contribué, l’année dernière, à réduire le fossé entre les organisations et les activistes du Nord et du Sud qui travaillent dans ce domaine. Elle a également présenté à Rio des parties d’une étude plus large portant sur les accords de commerce bilatéraux et régionaux entreprise par l’équipe du professeur Mary Wong au Franklin Pierce Law Center (Etats-Unis). Selon cette étude, il est à craindre que des règles plus strictes en matière de propriété intellectuelle ne soient adoptées par la voie bilatérale lorsqu’elles ne peuvent être obtenues par la voie multilatérale. Résultats pratiques en matière de propriété intellectuelle Outre des mesures visant à constituer des réseaux et un inventaire, des solutions pratiques ont été présentées par les membres de la Coalition lors des différentes sessions. À titre d’exemple, IP Justice a annoncé le lancement de la première clinique internationale de cyberdroit. Parmi les sujets à traiter « Les étudiants en droit impliqués dans le programme étudieront la question des politiques relatives à l’Internet notamment en ce qui concerne la protection de la liberté d’expression au regard de l’introduction par l’ICANN (Internet Corporation for Assigned Names and Numbers) de nouveaux noms de domaine (notamment les noms de domaine internationalisés) », aidant en cela les groupes d’utilisateurs individuels non commerciaux. Les facultés de droit participantes sont l’École de droit de Rio de Janeiro, l’Université de Hong Kong, l’Université nationale de Singapour, l’Université d’Ottawa et l’Université d’Afrique du Sud. Un autre projet pratique consiste dans le lancement de Certified Open, un service de certification conçu pour évaluer les aspects techniques et commerciaux des fonctions de verrouillage. Certified Open permettra aux fournisseurs de logiciels et de services d’évaluer leur propre capacité d’ouverture. Les autorités publiques (et d’autres) seraient alors en mesure de vérifier si les produits sont ouverts avant de les acheter. Si des abus sont possibles dans le cadre du processus d’auto-certification, dont les coûts seraient modiques et ouvert aux utilisateurs non commerciaux, Georg Greve, Président de la FFS, a estimé que les réponses aux questions concernant les capacités d’ouverture seront publiées, ce qui permettra de discuter des informations transmises. Un résultat positif ? Il a été difficile dans l’ensemble de mesurer le succès de ce deuxième forum. Certains ont souligné la forte participation, même si les représentants des entreprises étaient une fois encore moins nombreux que les membres des ONG et les représentants des gouvernements. D’autres ont relevé le succès rencontré par plusieurs ateliers, forums des meilleures pratiques et communications présentées par les organisations actives dans le domaine de la gouvernance d’Internet, notamment l’ICANN, les responsables nationaux des principaux noms de domaine, les opérateurs de serveurs racine, ainsi que le Conseil de l’Europe et l’Organisation de coopération et de développement économique. Matthew Sheers, qui représentait l’Internet Society lors de la clôture de la réunion, a souligné la volonté exprimée par les représentants des gouvernements d’installer des serveurs racine et des bornes Internet dans leurs pays. Les organisateurs onusiens, Nitin Desai, directeur du Forum sur la gouvernance de l’Internet et Markus Kummer, coordinateur exécutif du Forum, ont apporté leur soutien au protocole adopté lors de la réunion selon lequel aucune décision ne serait prise. Ils ont déclaré lors de la conférence de presse finale qu’aucune recommandation ni message n’avait été formulé lors du Forum. « Il y a de nombreux messages”, a dit Nitin Desai, « ils ont été exprimés dans les divers ateliers. » Nitin Desai a souligné que des discussions importantes ont eu lieu concernant la protection des enfants sur Internet qui pourraient permettre de décourager toute forme de « jurisdiction shopping » ou shopping judiciaire. Des appels à ne pas se concentrer uniquement sur les questions touchant à l’ICANN, aux serveurs racine et au système de gestion des noms de domaine ont été lancés afin de ne pas laisser passer l’occasion de discuter de l’adoption d’une Charte des droits sur Internet et d’une approche équilibrée en matière de propriété intellectuelle, du respect de la vie privée, de l’élaboration de solutions technologiques pour la gestion des identités, de l’éducation numérique et de la protection des enfants. Le Forum sur la gouvernance d’Internet a, d’une certaine manière, acquis une existence propre, loin des luttes originelles qui avaient eu lieu lors du Sommet Mondial de la Société de l’Information concernant la gestion des noms de domaine. Certains n’en continuent pas moins de chercher des solutions à cette question et ils ont commencé à le faire en dehors du Forum. Dans une déclaration de dernière minute, la Fédération de Russie a demandé au Secrétaire général des Nations Unies de mettre sur pied un nouveau groupe de travail chargé spécifiquement des problèmes relatifs à la gestion des noms de domaine et au privilège dont bénéficient les Etats-Unis dans cette matière. Le Bureau du Secrétaire général, de son côté, doit décider de la manière dont il entend procéder avec le Groupe de consultation du Forum sur la gouvernance de l’Internet, le groupe chargé des préparatifs et du déroulement des réunions du Forum. Une chose est sure après la réunion de Rio, les espoirs sont grands de pouvoir parvenir à des résultats probants lors de la prochaine réunion qui aura lieu à Delhi l’année prochaine. Share this:Click to share on Twitter (Opens in new window)Click to share on LinkedIn (Opens in new window)Click to share on Facebook (Opens in new window)Click to email this to a friend (Opens in new window)Click to print (Opens in new window) Related "Standards ouverts et accès à la connaissance au menu des discussions du Forum sur la gouvernance de l’Internet" by Intellectual Property Watch is licensed under a Creative Commons Attribution-NonCommercial-ShareAlike 4.0 International License.