Accueil timide pour le document de négociation de l’OMS sur la PI 16/08/2007 by Tove Iren S. Gerhardsen for Intellectual Property Watch Leave a Comment Share this:Click to share on Twitter (Opens in new window)Click to share on LinkedIn (Opens in new window)Click to share on Facebook (Opens in new window)Click to email this to a friend (Opens in new window)Click to print (Opens in new window)Par Tove Iren S. Gerhardsen Le nouveau document de négociation de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) élaboré en vue du dernier cycle de ce qui est devenu un intense processus d’analyse de l’innovation médicale et de la propriété intellectuelle restreint son champ d’action à environ douze maladies mais reste très ouvert en ce qui concerne les politiques à mettre en œuvre, consignant peu ou prou toutes les propositions. D’aucuns ont critiqué le manque de précision du texte, le qualifiant même de «document fondamentalement imparfait». Le document servira de base pour les négociations de la seconde et dernière session du Groupe de travail intergouvernemental sur la santé publique, l’innovation et la propriété intellectuelle de l’OMS (IGWG), qui se tiendra du 5 au 10 novembre. L’OMS a ouvert une procédure de consultation en ligne pour les mois d’août et de septembre, permettant aux Etats membres et aux autres parties prenantes de faire part de leurs commentaires sur le projet ainsi que sur la dernière résolution adoptée cette année par l’Assemblée générale de la santé (WHA60.30). Le document (Projets de stratégie et de plan d’action mondiaux, A/PHI/IGWG/2/2) «sera débattu dans le cadre des consultations régionales et servira de base aux négociations d’IGWG-2 en novembre», a confirmé une source de l’OMS à Intellectual Property Watch. Des sessions des comités régionaux de l’OMS ont été programmés pour août et septembre (IPW Monthly Reporter, vol. 4, n° 6). L’IGWG a été chargé de mettre sur pied d’ici à mai 2008 une «stratégie et un plan d’action mondiaux» destinés à promouvoir les activités de recherche-développement portant sur des médicaments contre des maladies négligées touchant essentiellement les pays en développement. Le nouveau document précise (dans une note de bas de page) que la stratégie se concentrera sur 14 maladies, dont le diabète, le cancer, le VIH/sida et la maladie de Chagas. Cette précision répond à une certaine confusion sur le nombre de maladies entrant dans la catégorie des maladies négligées. Publié le 31 juillet, le document se base sur un précédent rapport rédigé au terme de la première session du groupe de travail, qui s’est tenue du 4 au 8 décembre 2006 (cf IPW, Santé publique, 21 décembre 2006). Les membres du groupe de travail étaient convenus que les discussions s’articuleraient autour de huit éléments. Le nouveau document développe ces thématiques de manière détaillée, tant dans le projet de stratégie que dans le projet de plan d’action. En rédigeant le nouveau texte, le secrétariat de l’OMS a tenu compte des commentaires formulés dans le cadre de la procédure de consultation qui s’est conclue ce printemps. Le texte énumère les propositions des Etats membres en termes positifs. Ainsi, si un pays n’est pas d’accord avec une partie du texte, il devra en demander la suppression ou l’amendement. Flexibilités et gestion de la propriété intellectuelle Le document définit la stratégie à adopter avant de préciser les actions à mettre en œuvre. Dans le projet de stratégie, les propositions portent notamment sur la promotion de la législation visant à appliquer les flexibilités conformes à l’Accord de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (ADPIC) et à d’autres accords internationaux, la promotion de la recherche-développement en amont dans les pays en développement en adoptant une législation conforme à l’ADPIC en ce qui concerne les exemptions pour la recherche, ou encore la promotion du transfert de technologie et de la production de produits sanitaires dans les pays en développement. Le projet propose par ailleurs de promouvoir les accords commerciaux bilatéraux qui «n’instituent pas de protection ADPIC-plus», précisant que ces accords doivent être «régulièrement contrôlés» quant à leur impact sur l’accès aux produits sanitaires. Le groupe de travail demande en outre à l’industrie pharmaceutique de réduire les prix pour les pays en développement et propose d’encourager les partenariats public-privé, de faciliter les discussions préalables à un traité sur la recherche-développement médicale et d’étudier la possibilité d’adopter et de mettre en place des systèmes complémentaires d’incitation à la recherche-développement qui distinguent les incitations à l’innovation du prix pratiqué. Dans le projet de stratégie, les membres du groupe de travail encouragent notamment l’OMS à s’impliquer davantage dans le domaine de la propriété intellectuelle en collaboration avec l’OMC et l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle, dans le but de «renforcer la formation théorique et pratique à la gestion de la propriété intellectuelle». La gestion de la propriété intellectuelle fait partie des éléments qui n’ont pas été suffisamment détaillés dans le document. Le texte se contente en effet parfois d’énoncer des objectifs généraux, comme dans l’exemple suivant: «Il est indispensable de renforcer la capacité des pays en développement à gérer la propriété intellectuelle». La stratégie devra être réexaminée par l’Assemblée mondiale de la santé tous les deux ans – elle le sera pour la première fois fin 2009 – et soumise à une évaluation complète tous les quatre ans. L’échéance pour la mise en œuvre de la stratégie a été fixée à 2015. Egalement articulé autour des huit éléments définis, le projet de plan d’action est élaboré dans une seconde partie. Il est rédigé sous forme de tableau, de manière à mettre en évidence les mesures, les acteurs et le calendrier prévu pour chaque élément. Par exemple, l’OMS est chargée d’identifier les lacunes concernant la recherche sur les maladies négligées en 2008 et de coordonner le processus jusqu’en 2015, l’industrie pharmaceutique de faciliter la recherche en amont de 2008 à 2015 et les gouvernements de définir les priorités de la recherche et de financer davantage la recherche-développement sur les maladies négligées (en particulier les gouvernements des pays en développement). Les actions proposées impliquent une large palette d’acteurs, y compris des organisations non gouvernementales, des organisations des Nations Unies, l’industrie et les instituts de recherche. Un champ d’application trop large Le champ d’application du document a été critiqué. «Le projet de plan d’action est fondamentalement imparfait, car basé sur la velléité de faire converger des points de vue conflictuels. Il est ressorti de cette tentative 80 ‘actions spécifiques’ sans ordre de priorité et difficilement applicables», a déploré un observateur régulier qui souhaite rester anonyme. Et d’ajouter: «Les ‘actions spécifiques’ sont plus théoriques que pratiques et n’engagent en rien les gouvernements à entreprendre des actions concrètes». D’après la même source, «un véritable plan d’action devrait s’articuler autour de quelques priorités précises, notamment en ce qui concerne le financement, les institutions concernées et les nouveaux mécanismes d’incitation, définir des objectifs dont les gouvernements et les autres acteurs devraient rendre compte et désigner les institutions chargées de contrôler la conformité avec les objectifs envisagés dans le plan. Mais il sera très difficile de renverser la tendance dans le cadre du processus de l’IGWG.» Ellen‘t Hoen de Médecins Sans Frontières nous donne un avis moins tranché. «Il manque à ce document une direction et une définition claires des responsabilités. Mais il est encourageant de constater que de nouvelles propositions ont été intégrées, notamment le regroupement de brevets pour répondre aux problèmes d’accès aux produits et la définition de nouvelles règles pour promouvoir la recherche-développement.» Un observateur de l’industrie pharmaceutique salue quant à lui le fait que le document soit en tout point fidèle au cahier des charges de l’IGWG défini dans le rapport 2006 de la Commission de l’OMS sur les droits de propriété intellectuelle, l’innovation et la santé publique (CIPIH), mais s’inquiète du fait que le projet dépasse le strict cadre des droits de propriété intellectuelle et aborde les flexibilités de l’ADPIC, en particulier la licence obligatoire. Cette flexibilité permet à un gouvernement d’autoriser l’utilisation sous certaines conditions (par exemple sauf usage commercial) d’un procédé breveté sans le consentement du titulaire du brevet. Les suggestions visant à éviter les clauses ADPIC-Plus dans les accords commerciaux bilatéraux n’ont rien apporté de nouveau, a expliqué la même source, étant donné que les Etats-Unis ont déjà adopté des restrictions dans ce domaine (IPW, OMC/ADPIC, 24 juillet 2007). D’après cet observateur, si l’industrie accepte une approche ouverte et pondérée, certaines ONG et d’autres acteurs risquent de ne s’intéresser qu’à deux ou trois points centraux du plan. Et si le processus de l’IGWG ne sert qu’à aider les pays à mettre en œuvre les flexibilités de l’ADPIC, «c’est un échec», a-t-il conclu. Le document a été plutôt bien accueilli par les observateurs de la société civile internationale, d’après Spring Gombe et Thiru Balasubramaniam, membres de l’ONG Knowledge Ecology International (KEI), qui saluent les avancées en terme d’«accès aux médicaments, l’aide à l’application des flexibilités de l’ADPIC et les nouvelles méthodes visant à promouvoir la recherche-développement sur les nouveaux médicaments». Ils regrettent toutefois que le plan d’action reste «vague, sans définition claire des responsabilités ni notion d’urgence» et ajoutent: «il existe un autre risque… si la responsabilité des différents éléments du plan incombe à tous les acteurs sans distinction, aucun d’entre eux ne devra rendre des comptes. Par ailleurs, le grand absent de ce document est l’argent.» Les huit éléments sont les suivants: définition d’un ordre de priorité des besoins concernant la recherche-développement, promotion de la recherche-développement, renforcement et amélioration de la capacité d’innovation, transfert de technologie, gestion de la propriété intellectuelle, amélioration de la distribution et de l’accès, existence de dispositifs de financement durable et mise en place de mécanismes de suivi et de notification. Le texte précise que ces éléments «forment l’axe autour duquel s’articule le plan d’action». Vous pouvez adresser vos questions et vos commentaires à Tove Gerhardsen : tgerhardsen@ip-watch.ch. 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